Septembre - Edito

Septembre,

 C’est ton premier jour et cette année tu dois peiner à renaître parmi le chaos, les demi-visages et les demi-discours. Un vent plus léger a soufflé sur juillet et août. Sûrement le mouvement des corps libérés, le souffle ravivé par des espoirs de passage et surtout par le bénéfice du doute. C’est ton premier jour et c’est sur toi que ça tombe, de devoir être le premier de ce que l’on a nommé « le monde d’après ». Aux grilles des écoles tu soulages ceux, qui pendant de longs mois, ont attendu que cela cesse et tu déchires les cœurs, qui après tout ce temps à battre côte à côte, auraient voulu que cela ne s’arrête jamais. 

Septembre, c’est ton premier jour, il y a une belle lumière mais les journaux ne font qu’assombrir nos idées, que ce soit au sujet du Covid ou du reste. Aujourd’hui ils parlent toujours des femmes assassinées, harcelées ou agressées au hasard des rues, de chevaux tués et mutilés au hasard des champs, de l’enfer du Liban, de celui des migrants syriens subsahariens et afghans, tchadiens, nigérians, érythréens… Pandémie ou non, comment ne pas être malade? Avec ou sans vision, en pensant au futur, comment ne pas avoir les yeux troubles? Septembre, je t’attendais, pour un concert en plein air, pour ta lumière particulière et pour retrouver des gens qui vivent loin de moi, le cœur serré entre des frontières fermées. Septembre, je te respire de ma fenêtre puisque c’est interdit partout ailleurs, j’ai une vue imprenable sur les tours qui dominent le monde. De leurs bureaux, à cette heure, on voit le soleil qui s’effondre et on se fout que de l’autre côté de la Terre, des glaciers aussi. 

Septembre, ta première Lune est pleine, de là où je suis elle semble rouge et ronde, comme un signal d’alarme entendu et crié par certains, ignoré et occulté par d’autres. Septembre, cela doit te faire mal de nous voir divisés, d’être si tiraillé, aux frontières de saisons qui n’existent même plus. Il fait chaud et froid en même temps. C’est souvent comme ça, un premier jour. Chaud et froid en même temps. C’est tout de même moins grisant quand ils sont tous les deux soufflés par des gouvernements. Septembre, même si mon cœur surtout se serre, en pensant à mes idéaux et mes proches fragiles, de tout mon cœur, qui promet de faire de son mieux, je souhaite à tous la meilleure rentrée possible. Je m’élance sur des routes incertaines et ici il n’y a qu’en courant que l’on a le droit de respirer. Alors parfois j’ai peur que mon cœur s’essouffle, mais mon cœur ce fou, il continue d’espérer, un accueil un peu moins hostile pour novembre, pour janvier, pour avril.

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